Spiritualité Chrétienne

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Saint Fort de Bordeaux II

Saint Fort

Premier évêque de Bordeaux

16 mai

 

 

De longues et sérieuses recherches sur la vie de ce saint ont fini par aboutir et arriver à un résultat assez heureux pour fournir sur saint Fort des documents qui ne manquent pas d'intérêt et que les fidèles des paroisses qui l'ont pour patron liront avec plaisir.

 

Un livre du plus haut mérite, honoré d'un bref de Pie IX, et qui est l'ouvrage de Mgr Cirot, camérier de Sa Sainteté, chanoine de Bordeaux, «  Origines chrétiennes de Bordeaux, ou histoire de la basilique de Saint Seurin de Bordeaux », répand de grandes lumières sur la vie de saint Fort. L'auteur de cet ouvrage donne pour premier évêque de Bordeaux saint Fort. Rien de mieux soutenu, rien de plus pieux que cette tradition.

 

Saint Martial, l'un des soixante-douze disciples, suivit à Rome son parent et chef, l'apôtre saint Pierre. Là, il en reçut, avec saint Alpinien et saint Austriclinien, la mission d'évangéliser les Gaules, et, peu de jours après, le bâton pastoral dont le contact rendit la vie à Austriclinien, mort à Colle, en Toscane, en travaillant à sa mission.

 

Saint Martial, s'avançant par les voies romaines ouvertes devant lui, parvint en Aquitaine, en parcourant les villes qui gardent les monuments authentiques de son passage, débarqua à Soulac, et, par le Médoc, arriva à Bordeaux. Il y fonda au lieu de Saint Seurin le premier oratoire chrétien, y établit le premier évêque, baptisa grand nombre d'infidèles, et, glorieux de vertus et de miracles, retourna rendre son âme à Dieu dans son église de Limoges. En 1854, Pie IX a, par un décret de la congrégation des rites, reconnu le culte immémorial qui lui est rendu sous le titre d'Apôtre de l'Aquitaine.

 

Sainte Véronique fut associée à son apostolat. Cette pieuse femme, après la faveur insigne qu'elle reçut de la part du Sauveur montant au Calvaire, prit rang parmi les saintes femmes qui suivaient Jésus et Marie sa mère, au temps de la Passion.

 

Véronique vint à Rome avec l'image vénérée dont le contact guérit l'empereur Tibère de la lèpre, et l'y laissa comme un trésor qui devait rester à l'Eglise universelle. Elle est gardée à Saint-Pierre, au Vatican, parmi les plus précieuses reliques, et on voit au Panthéon le coffre avec inscription dans lequel elle fut transportée.

 

Cette première mission remplie, notre sainte femme s'attacha au ministère de saint Martial. On la voit avec lui à Colle en Toscane, puis abordant à Soulac, où ils élevèrent un oratoire à la très sainte Vierge. Sainte Véronique y fixe son séjour; là elle meurt pleine de jours et de mérites, l'an 66 de l'ère chrétienne.

 

Sainte Véronique ne fut pas seule à aider de ses prières et de ses services l'apostolat de saint Martial, elle eut pour noble émule dans cette œuvre, Bénédicte, épouse de Sigebert, nom germanique qui veut dire fort, comte de Bordeaux. La pieuse comtesse, munie du bâton de saint Martial, rendit la santé à son mari, arrêta une tempête sur le fleuve, un incendie dans la cité, et par ces prodiges amena la conversion au christianisme de Sigebert ou Fort (puisque c'est le même), suivi de plusieurs milliers de Bordelais.

 

Dès lors s'établit la première cathédrale de la cité, près de laquelle se forma le monastère où résida l'évêque saint Amand au Ve siècle, où il reçut saint Seurin qui voulut y être enseveli, d'où partirent les clercs porteurs des correspondances de saint Delphin et de saint Paulin, où vinrent, au IXe siècle, se convertir et reposer après leur mort les guerriers de Charlemagne.

 

Le cardinal de Sourdis, qui mérita la pourpre pour ses hautes qualités dans les sciences et surtout par ses vertus, et qui reçut des marques distinguées d'estime et d'amitié du pape dans ses voyages à Rome, a consacré ces souvenirs dans une ordonnance solennelle : « Ce n'est pas seulement par le bruit public et l'opinion générale que nous avons appris que l'église de Saint Seurin fut autrefois le siège métropolitain, mais nous en avons eu la preuve par les monuments les plus antiques et les plus certains... C'est l'église que saint Martial, disciple du bienheureux apôtre Pierre, d'un vieux temple autrefois dédié au Dieu inconnu, consacra la première en Aquitaine à la gloire du Dieu tout-puissant, à la bienheureuse Marie et au protomartyr saint Etienne, et où il sacra archevêque Sigebert (ou Fort), auparavant prêtre des idoles » (1). »

 

C'est en considération de cette antiquité que le cardinal de Cheverus attacha à la collégiale le titre de chanoine honoraire et que Sa Sainteté Pie IX, par lettres apostoliques du 27 juin 1873, lui a conféré le titre et tous les privilèges de basilique. Ces privilèges comprennent, outre les indulgences spéciales, le rang d'archiprêtre et autres droits honorifiques pour le titulaire.

 

L'église souterraine, ou la crypte de la basilique de Saint Seurin, est consacrée à saint Fort, aussi porte-t-elle le nom de crypte de Saint Fort. C'est dans ce lieu surtout que le saint est invoqué par des milliers de pèlerins. Son culte a éclipsé celui même de saint Seurin ; il a traversé les révolutions, et ramène chaque année à sa crypte une foule immense persistant dans sa dévotion et sa grande confiance à saint Fort.

 

Le vocable de la crypte, les sculptures, peintures, vitraux au chiffre du saint, ne peuvent laisser aucun doute sur la personnalité de saint Fort. Il est celui que saint Martial déclare avoir établi premier évêque de la cité dans son épître aux Bordelais, dont un manuscrit du xe siècle a été retrouvé à la Bibliothèque nationale. Il est le martyr dont la décapitation est représentée dans une peinture murale, visible encore sous les panneaux du chœur, et où se montrent encore une niche munie d'une porte avec ses ferrures et le guichet à travers lequel on apercevait le bras de saint Fort. On y lit : « Saint Fort, priez pour nous ». Ce n'est que par ces titres que l'on peut expliquer plusieurs églises et monuments qui lui sont dédiés.

 

Cette crypte de Saint Fort est une véritable église composée de trois absides et de trois nefs séparées par des colonnes, avec leurs chapiteaux, pris, d'un édifice romain. Au fond de l'abside principale se font remarquer plusieurs tombeaux avec deux vases renfermant des cendres d'enfants. Celui de saint Fort occupe le centre et fut, au XVIIe siècle, surmonté du mausolée à six colonnes qu'on remarque aujourd'hui. Dans une châsse d'or et à jour, repose le corps de saint Fort, en majeure partie, moins le bras droit, sur lequel se faisaient les serments, et qui a disparu dans la révolution. Dans une des verrières on remarque plusieurs sujets très intéressants qui ont rapport à saint Fort. On admire surtout sa châsse d'or, son image en habits pontificaux, et dans les panneaux latéraux les diverses classes de pèlerins qui accourent à son tombeau, et notamment le maire qui prête serment sur son bras sacré.

 

Parmi plusieurs ouvrages de décoration dont la boiserie de l'autel pontifical est enrichie, qui attirent l'admiration des visiteurs, et que M. de Montalembert, dans son livre du Vandalisme, considère comme le monument le plus précieux de cette église, nous devons surtout nous arrêter devant la scène merveilleuse où saint Martial, paré de tous ses insignes pontificaux, remet à la comtesse Bénédicte, qui sollicite son pouvoir auprès de Dieu pour la guérison de son mari, le bâton de saint Pierre devenu le sien. Dans la partie intérieure du même compartiment, Sigebert (ou Fort), couché, reçoit de son épouse le bâton qui lui rend la santé. Reconnaissant de ce bienfait, Sigebert (ou Fort), avec plusieurs milliers de ses soldats, embrasse le christianisme, et saint Martial se dispose à les baptiser. Dans le compartiment joignant, on remarque le martyre de saint Fort. Ici comme dans la peinture murale dont il a été parlé plus haut, des remparts et une porte de ville, des soldats romains, un prêtre décapité et d'autres agenouillés qui attendent leur tour, un autel, une lampe, indiquent les catacombes où ils ont été saisis, le lieu où ils ont été traînés pour leur martyre, leur genre de supplice et l'époque où il s'accomplit ; tout cela convient à saint Fort, premier évêque de Bordeaux. En terminant notre récit, fixons nos yeux sur la rosace des saints patrons de la Basilique. C'est comme le résumé des autres verrières. Notre Dame de la Rose occupe le centre : autour d'elle se placent saint Fort, saint Seurin, saint Amand, saint Martial, saint Etienne, sainte Véronique tenant la sainte face, sainte Rose de Lima, patronne d'une confrérie de jardiniers, sainte Bénédicte.

 

 

(1) Une monnaie mérovingienne du cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale ne permet pas de doute sur cette question. Elle porte : « Eglise Saint Etienne, à Bordeaux », et constate en sa faveur le droit de battre monnaie, réservé aux églises épiscopales.

 

 

Prière à Saint Fort

 

Très illustre saint Fort, qui dès les premiers jours de l’Église naissante avez suivi saint Etienne dans la voie glorieuse du martyre, et qui avez reçu de Dieu un si grand pouvoir dans le ciel et sur la terre, surtout en faveur de ceux qui vous invoquent avec confiance pour les besoins du corps et de l'âme, et pour la guérison des enfants malades ; protégez-nous, grand saint, dans toutes les maladies et les dangers de cette vie ; secourez-nous dans tous les combats du salut, et obtenez-nous de Dieu d'augmenter dans sa grâce à mesure que nous avançons dans la vie, et d'arriver un jour au Ciel pour y partager votre bonheur et y glorifier Dieu pendant l'éternité. Ainsi soit-il.

 

Imprimatur

Vesunt, die 9 aprilis 1879.

Boilloz, vic. gen.

 

 

 

(Extraits de Saint Fort, Abbé Ballot, impr. de Jacquin, Besançon, 1879)

 

 

Pour approfondir

 

Saint Fort, premier évêque de Bordeaux et Martyr

 

 

 


16/05/2022
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