Spiritualité Chrétienne

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Sainte Claire d’Assise nous parle de la Pauvreté

Sainte Claire d’Assise nous parle de la Pauvreté


Le Détachement de Sainte Claire

Ce que saint Claire vient vous dire ici de la pauvreté, c’est-à-dire de son détachement de toutes choses spirituelles ou matérielles, n’aura rien d’austère ni de dur. Le détachement a deux versants, l’un négatif et pénitentiel, l’autre positif et joyeux. Le premier regarde ce qu’il quitte, les seconde ce qu’il acquiert? D’un côté c’est l’effort douloureux qui rejette, de l’autre la libération au profit de l’amour. C’est en ce sens qu’il nous faut tourner nos regards. Un bienheureux, religieux dans un Ordre frère de celui des Mineurs, disait volontiers : « Au lieu de penser dans cette à ce qu nous manque, appliquons-nous à découvrir ce dont nous pourrions encore nous passer ». Ne faut-il pas jeter du lest pour monter haut ? Or la première chose qu’un chrétien, disciple de l’Évangile, de saint François et de sainte Claire, doit laisser sur la route, c’est l’inquiétude ; l’inquiétude des païens qui n’ont pas de Père au ciel, l’inquiétude des errants sur la terre, sans Christ intercesseur et ami, sans famille là-haut qui les affectionne et des soucies d’eux. Mais cette première chose est aussi la dernière qui, sous des formes de plus en plus raffinées et subtiles, entrave jusqu’au dernier jour le vole des âmes vers leur repos. Certes, en ces temps d’Apocalypse, il est aisé de parler d’esprit tranquille, de cœur sans souci, mais la pratique en est-elle possible? L’Église nous dit : « Jetez vos soucis dans le Seigneur, lui-même vous nourrira ». N’est-ce pas une parole pour les temps de paix ! Non, au contraire. Tout est violence et paradoxe dans le royaume de la foi. C’est la marche sur les eaux mouvantes et furieuses, à l’appel du Christ, Sainte Claire va nous parler des détachements qui enrichissent, Écoutons-la. René Zeller.


Le détachement dans de la richesse


Le détachement de l'opinion


Tout était fait pour sainte Claire, lorsque, vêtue en pauvre et la tête rasée sous son voile, elle prit la dernière stalle au cœur des bénédictines de Saint-Paul ( c’est le nom du monastère où saint François l’avait conduite), s’essayant à l’ oeuvre de Dieu. Elle était bien sûre d’être si fort détachée de tout que rien ne pouvait trouver sa paix. Or, au lendemain même de son entré, quelque soupirant déçu, car elle était belle et recherché en mariage assiège avec une troupe de parents et d’amis la porte du couvent, Claire refuse de se montrer, puis, cédant aux instances des bénédictines qui ne savent comment calmer les furieux, elle apparaît raidie, les yeux baissés et sans mot dire, laisse tomber son voile. La vue de la tête rasée atterre les jeunes gens ( la « chevelure d’Or » de Claire)était célèbre dans la ville ; ils reculent et disparaissent. En accomplissant son geste, Claire est obligés de se vaincre. Certes, elle ne tient plus au charme féminin, et l’auréole lumineuse de son visage, tombée aux pieds de François, ne lui laisse pas de regrets. Mais se montrer rasée à l’élégante jeunesse de la ville lui répugne, ne va-telle point passer pour folle ?


Les religieuses qui l’ont accueillie ne la blâment point, ne se soucient pas de voir recommencer des scènes de scandale à cause d’elle ; la jeune fille est transférée dans une autre abbaye du même Ordre, celle de San Angelo di Panso, au versant occidental du Mont Subasio. Là, sa jeune sœur Agnès vient la rejoindre ; mais la joie de lui voir partager son idéal de pauvreté parfaire par amour du Christ est de courte durée. Cette fois, ce n’est pas un prétendant éconduit qui vient redemander au cloître ce qu’il enlève au monde, c’est l’oncle des deux sœurs, Messire Mondaldo, il est venu à cheval, escorté d’autres cavaliers, tous résolus à ramener au foyer sinon l’aînée au moins Agnès qui n’a qu’une quinzaine d’années. D’abord ce sont des caresses et des implorations, puis des menaces, des coups, et l’enfant enlevée de force est traîné sur la route, Claire n’est pas aux côtés de sa sœur pendant qu’on la maltraitait ainsi, ne devrait-elle pas l’exhorter à céder ou la défendre ? Si la fille du Poverello a été traité d’insensé, tout au moins d’exaltée, que doit-on maintenant penser de son cœur ? On la croit certainement inhumaine; Agnès ; elle-même s’étonne ne l’appelant en vain. Mais Claire sait qu’elle est impuissante par elle-même à lutte contre ces cavaliers forts et armés, elle n’a pas daigné s’expliquer, défendre son point de vue lorsqu’un soupirant, sans doute de haut lignage, était venue la réclamer à Saint-Paul : maintenant la jeune fille continue à se taire devant les hommes, pas de gestes éplorés, d’admonitions véhémentes qui montreront au moins la sensibilité de son âme, puisque seul Dieu peut l’aider, c’est à Dieu seul qu’elle vas s’adresser ; et transis que la scène de violence se poursuit dehors, Claire prie devant l’autel. On sait comment la vierge fus exaucée. Sa jeune sœur, étendue sur la route et luttant avec ses agresseurs est devenue soudain si lourde qu’aucune main humaine n’arrive à la soulever, seul sainte Claire, sachant sa prière exaucée, vient enfin la relever d’un geste, alors Monaldo tourne bride, effrayé par le miracles. Certes, dans le mutisme de sainte Claire en face des attaques des mondains, il y a une part de caractère personnel : réserve de jeune vierge, courage et fierté aristocratique, domination d’elle-même ; inférieur d’Assise : lointaine commune princesse des vieux contes, avec une petite bouche serré, volontaire, toute douceur étant concentrée dans les yeux recueillis , aux longues paupières, toutefois l’indifférence sur l’opinion d’autrui est une vertu rare chez les jeunes, que rien encore n’a blasé, et très difficile. La jeune fille, surtout, a besoin qu’on sache les motifs de ses actes, quand ces motifs sont élevés ; rien ne la froisse comme l’accusation de sécheresse de cœur, de dureté, alors qu’elle souffre précisément pour ceux qu’elle aime.


L’altitude où vit déjà sait Claire, sont détachement de l‘estime, même vis à vis de ceux qui lui touchent de plus près est encore le fruit d’un amour soutenue par une foi très vie. Celui qu’elle a choisi remplit assez son cœur pour qu’elle trouve en lui la force de dominer ses déchirements intimes, mais surtout Caire est sûre l’efficacité de la parole évangélique : Si vous aviez la foi comme un grain de sénevé vous diriez à la montagne : Ôte-toi… Ainsi, par la seul arme de sa prière, elle délivre son sœur, après avoir vaincu le besoin de justifier sa conduite.Que nous devions nous efforcer d’imiter sainte Claire dans sa foi et dans son amour, nul n’est petite douter, mais son héroïque détachement de l’estime est-il vraiment à poser en exemple ? Oui, mas dans l’application pratique il faut savoir procéder avec sagesse.


Le souci de sa propre réputation est un devoir essentiel du chrétien ; ce n’est pas seulement en pensant aux pécheurs notoires que Jésus a dit : « Gardez-vous de scandaliser… » Saint Paul est très explicite sur ce sujet : « tout est permis, dit-il, mais tout n’est pas opportun ». et dans sa première Épître aux Corinthiens il ajoute : « Prenez garde que la liberté donc vous jouissez ne deviennent une occasion de chute pour les faibles ». Il est donc permis, recommandé même d’avoir souci de l’estime des autres même si notre devoir de chrétien nous oblige strictement à faire quelques actes de notre prochain, moins éclairé ou appelé à une moindre perfection, juge peu raisonnable, mieux vaut parfois s’expliquer. Là encore, l’héroïsme de saint Claire nous situe dans le principe, dans l’idéal. Aussi bien, il est de cas où son exemple et cependant, et strictement, de la sagesse surnaturelle, même pour les faibles que nous sommes. L’esprit, mondain ne comprendra jamais les actions accomplies dans l’esprit de Jésus, il en comprend même pas le désintéressement en faveur d’une noble cause, comment comprendrait-il l’amour de notre Dieu invisible, la foi dans le bonheur secret de sa possession ? Mais pour nous qui avons cru en l’évangile, en la réalité du monde spirituel affirmé par saint François et saint Claire, reproduisant à nouveau Jésus, faisons pour le mieux, gardons-nous de scandaliser mais n’espérons point plaire à la fois au monde et au Christ.


Le respect humain, tel qu’il sévissait a XIX e siècles n’existe plus dans notre génération. Le « curé sac au dos » de 1914 a commencé le mouvement de libéralisme sympathique envers l’Église, que les groupements catholiques professionnels et ouvriers n’ont pu qu’élargir. Toutefois, si l’on ne rougit plus d’aller à la messe, il est gênant parfois, de pousser ouvertement la morale chrétienne jusqu’en ses conséquences les plus rigoureuses, sans parler des jeunes gens qui laissent, comme sainte Claire, une fortune terrestre pour suivre un vocation religieuse ( on sait qu’ils seront toujours traités d’exaltés, des cœurs secs ou d’amoureux déçus ), les époux chrétiens ont à braver l’opinion du monde. Jamais père de famille nombreuses, qui sans fortune personnelle compte sur le père du ciel pour l’aider à nourrir ses enfants, se passera pour intelligent, tel industriel, tel commençant, tel notaire, tel banquier rebelle à toute combinaison qui ne soit pas stricte justice chrétienne, irritera la conscience plus souple que d’autres qui le mépriseront. Le patron plus sociaux du bien moral et matériel de ses ouvriers que de son chiffre d’affaires passera pour un utopiste. Il faut du courage pour trancher sur les autres le braver ( sans arrogance, d’ailleurs ) l’habituelle et facile morale qui constitue un compromis entre celle du Christ et celle de l’égoïsme mondain, il faut surtout la même foi, le même amour qui auront présidé ; à l’offrande première de la vie. Le Christ est exigeant mais fidèle ; ce qu’il a dit s’accomplira en toute rigueur, on ne le peut tromper par des biais. C’est à Lui qu’il importe de plaire et non aux hommes. La certitude d’avoir agi comme il aurait agi lui-même, de lui avoir plu, vaut bien quelques mécomptes humains. D’ailleurs sa parole est vérité et si ses amis sont toujours plus ou moins sous le pressoir tant qu’ils vivent dans le monde, ils sont sûrs que, n’ayant pas rougi de lui sur la terre, il les louera un jour en présence des anges.


Le détachement de la volonté


Le détachement dans l'attachement


La religion franciscaine ou, pour mieux dire, la religion évangélique, est imprégnée d’un arôme de tendresse, d’une douceur de cœur qui exclut l’érémitisme farouche et encourage les amitiés pures. Sainte Claire, dans son affection pour saint François ne se reprochait nullement son désir de le voir, de jouir de sa conversation. Saint François de son côté aimait « consoler sainte Claire avec saintes paroles ». Pour la fille des Offreduccio, si l’on en croit l’auteur des Fioretti, elle eut même le désir juvénile et bien féminin de partager une fois son repas. On se souvint de la scène, exquise entre toutes. D’abord les réprimandes que les compagnons du Poverello adressent à leur Père parce qu’il paraît vouloir repousser le désire de sa « Petite Plante». Ils avent bien que François souhaite pour lui-même la consolation de ce repas qui lui rappellera la Cène de Jésus mais c’est justement de son secret désirer qu’il se méfie et peut-être aussi des clavaudages de la petite ville ; alors les compagnons insistent, essayant de persuader le Poverllo que son refus n’est pas bien : « Père, disent-ils, il nous apparaît qu’il n’est pas selon la charité divine de n’exaucer point sœur Claire, si sainte et si chérie de Dieu en une chose si petite, savoir de manger avec toi… Et de vrai, te demanda-t-elle grâce plus grande le devrais-tu faire à la plante spirituelle ».


François se laisse encore un peu prier, pour la forme, puis décide que le repas aura lieu à Sainte-Marie des Angle où Claire « a été tondue et faite épouse de Jésus-Christ ».


Au jour convenu, elle descend, avec une compagne, la colline où la suavité de l’amour divin, jailli du cœur du Poverello embaume déjà, et pour toujours les chemins, les prairies et les bois. Elle arrive à Sainte-Marie des Anges et salut l’autel de son offrande puis vient s’asseoir sur la terre nue, à côté de saint François dont les yeux sourient.


Or, comme il commençait « en guise de première viande à parler de Dieu », tous deux furent ravis en extase et sur la forêt « ardait un grand feu » qui fit accourir le paysans des villages environnantes. Or, ce feu, n’était autre que « feu divin et non matériel », cette légende comme les vraies légendes sorties naturellement du fond des « dicts» populaires et non inventées par les littérateurs est vraie par ce qu’elle signifie ; la ferveur exquise des rapports d’âme entre le Saint et la Sainte, a travers la naïveté du récit perce la psychologie vécue des échanges spirituelles entre Claire et François. Non seulement la communauté d’amour divin, les lie mais la joie, cette joie qui est déjà dérobée au ciel sur la terre, de sentir son propre amour se centupler, au contact de l’autre ; et c’est le sens de ce grandeur , au-dessus de Sainte-Marie des Anges pendant l’entretien du père et de sa petite plante. Quelle réserve toutefois : saint François se laisse prier, supplier, avant de céder au désir de Claire. Celle-ci n’intervient pas elle-mêmes, n’a-t-elle pas peur aussi d’un goût de gourmandise spirituelle en forçant, par une supplique directe, une réponse favorable du Petit Pauvre ?


Les frères qui s’offrent à plaider pour elle savent bien si son désir est légitime, c’est à eux qu’elle s’en remet. Tous deux se rencontrent enfin, le cœur brûlant intérieurement comme les disciples d’Emmaüs, tandis que le Seigneur était mystérieusement caché entre eux. Tour est modestes et retenue, au profit d’une qualité de tendresse exceptionnelle. Les autres rapports entre François et Claire portent d’ailleurs le même cachet de discrétion et d’humilité. S’agit-il, au moment de la solennelle et définitive option de saint François entre la vie apostolique et la vie érémitique, d’avoir l’avis de sainte Claire ? Le Petit Pauvre n’en profite pas pour accourir à Saint-Damien, pas plus que la Sainte ne se rend importante en témoignant d’une façon quelconque qu’elle est sensible à l’honneur qu’on lui fait, tout se passe dans la simplicité, dans un profond détachement du cœur, Saint François attend au loin; priant dans la forêt, sans même faire un pas en avant quand reviennent ses messagers ! Claire lui fait dire simplement ce qu’elle croit avoir appris dans sa prière, c’est tout.


Aucun scrupule vis-à-vis de Dieu dans l’affection réciproque ni même dans les joies de cette affection ( si parfois saint François s’en défend, c’est crainte d’encourager par son exemple de trop fréquents rapports entre les frères et les « Pauvres Dames » ). Mais toujours tant de calme, de mesure, de soumissions aux possibilités et aux convenances, de recueillement au milieu même des effusions. Bien longtemps sainte Claire, cloîtrée strictement après l’établissement des statuts définitifs de son Ordre, désirera en vain s’entretenir de Dieu ave son Père ; mais on ne trouve pas dans sa vie aucune trace de récrimination, ni même d’agitation au sujet de ses déceptions. Vint un jour où elle fut récompensée, François se rendant à Rieti pour y consulter un célèbre oculiste, Arrêté par la maladie à Saint-Damien et dans l’impossibilité d’aller plus loin, il passa le mois d’août sous une hutte de roseaux que ses frères lui construisirent dans le jardin de sainte Claire. Repos de l’âme, repos du cœur auprès de sa petite plante, climat spirituel entre tous qui fit chanter si fort le cœur du saint que nous devons à ce séjour à Saint-Damien le cantique du soleil.


Après ce chant de cygne, Claire ne devait plus revoie son être vivant. L’affection qu’elle lui portait était plus forte après celle de Dieu, et bien souvent les deux tendresses, celle du Christ et celle de François devaient se confondre dans son âme, mais elle aimait aussi sa famille terrestre et sa famille spirituelle. Là encore elle sut équilibrer la libre spontanéité des sentiments humains avec les exigences de son don total à l’amour divin. Elle avait accueilli dans son propre monastère sa mère, dame Ortolane, et c’est avec un grâce affectueuse qu’elle l’envoyait guéri à sa palace, avec le signe de la croix, les malades attirés par sa sainteté et lui demandant des miracles. Sans plus de scrupule elle eût gardé près d’elle sa sœur Agnès, doublement sa sœur mais les exigences des fondations la lui firent envoyer au loin. Les lettres de regret d’Agnès exilée sont déchirantes, Claire compatit mais ne céda point.


On rencontre que dans les derniers temps de sa vie, plus attachée que jamais à l’intégrale observance de la pauvreté, elle était cependant pleine d’égards pour les malades, exigeant pour elles des matelas, des « oreillers de plumes », au besoin des chaussons de laine. Elle voulait que les débiles, les sœurs les plus jeunes, celles qui travaillaient au dehors fusent « dispensées du jeûnes avec miséricorde». Ainsi savait-elle allier la bonté à l’austérité, l’affection aux rigueurs nécessaires. Le secret n’en est point dans une sagesse l’Ordre philosophique, mais toujours dans ce détachement d’elle-même, qui lui faisait prendre le Christ pour règle des ses affections comme de sa conduite.


Si, nous l’avons faire remarquer déjà, la religion franciscaine est par excellence religion d’amour et favorise tous les affections sincères et légitimes, il n’en demeure pas moins vrai que l’intérêt même de ces affections est de les recevoir de Dieu et de les lui confier. Est-ce en s’obstinant à des jouissances du cœur, mêmes pures, mais au détriment du devoir d’état qu’on les garantir ? la discrétion, la mesure, une attitude vraiment libre, prête à sacrifier une entrevue désirée pour des devoirs supérieurs de religion ou de charité, est la meilleure sécurité de notre cœur. Le Maître de notre vie est aussi le Maître de toute les formes de notre bonheur ; vouloir ménager avec obstination des présences, des démonstrations d’affection est à la fois une gourmandise et une avarice; cela risque, d’ailleurs, de lasser ceux dont nous attendons des joies du cœur.


L’amour dominant de notre Christ, la foi en sa miséricorde envers nous, l’habitude de ne rien attendre que de sa main règleront nos joies d’affection comme nos volontés et notre cœur allégé n’en demeurera que plus tendre.


Le détachement spirituel


Le Détachement spirituel est-il nécessaire, et sainte Claire n’a-t-elle pas eu raison de lutter, même contre les conseils prudents de l’autorité ecclésiastique, afin de maintenir dans l’intégrité absolue son idéal de pauvreté ?


On saint que lorsque le pape Grégoire IX vient à Assise pour la canonisation de saint François, il voulut visiter de personne l’Abbesse des « Pauvres Dames ». Témoin de l’austérité dans laquelle vivait la fille des Offreduccio et ses compagnes, la plupart élevées dans toutes les délicatesse du monde, il eut compassion d’elles et leur proposa des adoucissements, le temps était déjà passé où les aumônes affluait dans le sac des frères mendiants, or c’étaient les frères qui quêtaient pour les sœurs. Les années se faisaient dures, l’enthousiasme pour l’esprit de saint François baisait avec les difficultés matérielles. Pourquoi les sœurs n’accepteraient-elles pont quelque possession commun qui leur permit d’avoir a moins assuré le strict nécessaire de vaquer ainsi plus tranquille et à l’oraison ?


La réponse de sainte Claire fut digne du geste de saint François jetant sa bourse et ses vêtements aux pieds de son père : « Je ne désire nullement être dispensée de suivre le Christ », dit-elle.


Et elle affirmait par cela même sa fidélité à l’appel très spécial de sa vocation : prouver par son exemple que la parole évangélique est rigoureusement valable pour tous les temps : « N’ayez ni bourse ni chaussure… ».


Son idéal spirituel une fois sauvegardé dans son intégrité, sainte Claire se montra-t-elle farouche envers ceux qui ne le partageait point ? Si, d’une part peu de fondatrice ont dû lutter avec autant d’énergie pour défendre la parole que le Saint-Esprit avait déposée dans leur cœur, il en est par ailleurs, bien peu aussi, il n’en est peut-être point, dont les rapports avec la hiérarchie ecclésiastique aient été plus constamment cordiaux et respectueux de part de d’autre. C’est le Saint Père et le Cardinal Hugolin sentaient bien qu’en la rigidité, il n’y avait aucun entêtement personnel, rien de l’amour propre humain si habile à se glisser sans les entreprises les plus religieuses par leur but. La Petite Plante de saint François n’était si intransigeante dans l’observance de la stricte pauvreté qu’à cause de l’Évangile en lequel elle avait cru et qu’elle ne voulait point trahir. Pour ce qui était de sa conception, personnelle, la grande abbesse savait très compréhensive et souple. On l’a déjà vu dans la bonté avec la quelle, malgré la rigueur de sa propre austérité elle voulait des soulagement et même du confort pour ses sœurs malades. On le vit surtout par son attitude lors du grand conflit qui éclate entre frère Élie et les premiers compagnons de saint François. Plus que quiconque, Claire savait à quoi s’en tenir sur la pensée du fondateur, cependant elle s’abstint prendre parti. Elle avait gardé intact au prix de luttes opiniâtres, l’héritage du Père séraphique, elle ne jeta point la pierre, pour autant, à frère Élie, lequel rêvait la grandeur de son Ordre d’une façon plus stable et plus temporelle. Les querelles intestines venaient mourir a seuil de Saint-Damien ; frère Élie, en tant que frère mineur, sera toujours accueilli par les « Pauvres Dames » ; il les avait d’ailleurs maintes fois réconfortées et instruites par sa doctrine. Une telle sagesse était le fruit du détachement surnaturel de sainte Claire.


La pierre de touche qu’une œuvre est vraiment accomplie par obéissance à l’Esprit-Saint est, précisément, cette liberté bienveillante du jugement en faveur des autres formes du bien. Un secret orgueil de sa vocation, de ses prérogatives spirituelles, se sentir choisi, séparé, gâte souvent, tel un ver caché aux creux d’un beau fruit, l’épanouissement d’une âme dans la vérité ; en tous cas ce dédain voilé, mais réel, en face de ce qui semble contredire notre idéal, dans le domaine religieux, entrave toujours le rayonnement apostolique.


Les laïcs, même s,ils ne sont pas directement visés par ce sentiment de supériorité que certaines âmes attachent à leur appel spécial, le sentent très bien vivement et s’en trouvent facilement scandalisé : surtout lorsque la pratique de la compassion, de la miséricorde envers toutes les modes extérieurs ou intime d’indigence, ne vient pas neutraliser cette forme subtile de l’orgueil.


Ce défaut du mauvais attachement spirituel est aussi fréquent, peut-être davantage encore dans les œuvres laïque ou non-laïques que dans les groupements religieux. Idée de peut être réellement voulue par Dieu, mais l’homme s’en est emparé et, volant pour ainsi dire le bien de l’Esprit Saint, il fait de l’œuvre de Dieu son cœur à lui, donnant libre cours, encore que d’une façon plus ou moins avoue à sa propre conscience, à son besoin d’activité humaine, pour ne pas dire à son ambition.


Mais les fils de l’Évangile, dont le regard et le cœur sont restés rivés au Christ, dans leur simplicité première, ignorent ces entraves de l’âme à son libre essor ; leur zèle n’est point de « zèle amer » dont sainte Claire eut une fois à se plaindre à propos de quelques frères, qui critiquaient ses fréquents rapport spirituels avec les fils de saint François ; c’est un zèle doux et compréhensif, le seul qui gagne vraiment les âmes.


Le détachement de la vie


Les dernières années de saint Claire se passèrent dans des souffrances continuelles. Son corps, épuisé d’austérité lui était un foyer de souffrances et de sacrifices pour Dieu ; mais rien n’altérait sa paix.


« Depuis que j’ai connu la grâce de mon Seigneur Jésus-Christ, à moi révélée par son serviteur François, pouvait-elle dire en vérité, aucune peine ne m’a paru fâcheuse, aucune pénitence ne m’a semblé rude, aucune infirmité ne m’a semblé dure ».


Ainsi la joie première de son offrande s’était-elle conservée à travers ses détachements de plus en plus profonds ; détachement des richesses, de l’estime, de la volonté propre, détachement dans l’attachement même et dans la poursuite, pourtant obstinée de son idéal spirituel, le secret de cette réussite extraordinaire est tout entier dans ce que laisse entendre sa première phrase : « Depuis que j’ai connu la grâce de mon Seigneur Jésus-Christ ». Cette grâce est celle de la foi et de l’amour envers la personne du Sauveur, grâce demeuré intact dans le cœur si pur, si vrai et si vaillant de sainte Claire.


Il ne restait même pas, pour elle, à se détacher de la vie. La Sainte, de plus en plus unie à son Christ avait en Lui son existence même et la mort ne pouvait pas lui apparaître autrement que comme la consommation de l’union. Toutefois, son dernier jour étant arrivé la longue suite des renoncements, des privations, des austérités, des dénuements qui avaient composés sa vie terrestre lui revint en mémoire comme un souvenir heureux auquel souriait son cœur. Ses sœurs l’entendant parler doucement avec une personne invisible pensant sans doute, qu’avant de paraître devant Dieu elle conversait avec lui ; mais non, c’est avec son âme que s’entretenant saint Claire et elle la félicitait ainsi : « Va en paix, tu as suivi le bon chemin , va confiante, ton Créateur t’a sanctifiée, ta gardée sans cesse, t’a aimée avec toute la tendresse qu’une mère a pour son enfant ». Au moment suprême, le sens de sa lui apparut si lumineux et si beau qu’elle eût pour dernière parole le mot le plus simple et le plus profond qu’un être humain puise avoir en retournant vers son Père ; « Mon Dieu , je vous remercie de m’avoir crée ». Dans le sens absolu du mot, le détachement de la vie ne peut ni ne doit exister.


Le Fils de Dieu est venu en ce monde pour nous la donner, et la vrai vie, c’est la vie éternelle ; mais il a dit, parlant de l’existence terrestre, telle que l’homme charnel la rêve : « Celui qui hait sa propre vie, la trouvera ». Sainte Claire sur son lit de mort, proclamant avec la simplicité de la vérité le succès final de son existence de détachement, est une merveilleuse illustration de cette parole évangélique.


Et, si l’on y réfléchit à la lumière de la foi, n’est-il pas rigoureusement vrai que tout perdre du coté de la confiance en soi, de l’attachement à ce qui est transitoire et peut à chaque instant nous échapper, pour tout laisser ; sa sécurité matérielle, sa réputation, sa volonté ses affections, sa vocation spirituelle, à la Providence miséricordieuse de notre Père, c’est, en toute sécurité assurer notre vie.


Au dernier jour de notre course terrestre, nous la retrouverons alors parcourue dans le sens où notre Père le voulait, à chaque action accomplie par votre personnelle en dehors de Dieu étant un écart. « Je sais à qui j’ai confié mon dépôt », disait saint Paul, il ne s’agit que de croire et d’aimer, c’est le début, le progrès et le terme. De croire que la parole évangélique : « Ne vous inquiétez pas, votre Père sait… « a une valeur d’absolu. D’aimer assez pour s’arracher à soi-même et se jeter en Dieu, pour toujours.

 



07/06/2009
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